Trois volets de peinture

1
-Artifice de la lumière

2
-Onirisme horticole

3
-2010, l'eau monte

 


-Artifices de la lumière

L’œil du peintre, nous plonge dans les gestes et les pensées de ses contemporains, avec ce qu’elle croit être simplement de l’ironie et de la tendresse et qui pourrait aussi bien passer pour la plus cruelle des dissections .
Elle mêle volontiers dans ses compositions les personnages et les objets qui les conditionnent, explorant les lignes de forces de correspondances matérielles, instincts et notions subjectives qui déclenchent l’automatisme d’une intime mémorisation des choses de la vie.

On retrouve dans sa manière de peindre le même goût immodéré pour la couleur, toujours foisonnante, qui se porte plus volontiers sur les teintes claires et acides comme si persistait, au-delà de la surface et diffusé à travers l’épaisseur virtuelle de la toile, le lointain rayonnement d’une source lumineuse. Sa façon de peindre rappelle aussi le procédé utilisé pour ses installations projectives : un travail sur la transparence basé sur le découpage des espaces et la superposition des couches colorées, bannissant tout effet de matière. La toile ne semble qu’un écran captant des impressions retenant des traces de lumière .
La lumière ici n’est pas celle du jour. On a suggéré qu’elle émanait de l’intérieur, révélant les figures par transparences. Elle pourrait aussi provenir d’un éclairage artificiel, du halo d’un néon, des rais obliques de stores, créant une atmosphère onirique.


-Onirisme horticole

Anne Laurence TERRASSE nous donne sa représentation de la nature.

Cette série de peintures sont un hymne au couvert végétal et à ce qu’il nous réserve d’intimité. Dans ses méandres, elle puise son inspiration et crée des configurations étranges se substituant à ce que l’on connaît de ces paysages aux espaces secrets.
Au-delà d’une réalité incertaine, ses peintures offrent au regard des germinations inédites dans un monde sans échelle. L’enchevêtrement de tiges aux lignes tendues architecture l’espace et définit une organisation graphique, suggère le mouvement d’ascension verticale des végétaux pour s’extraire du sol.

La couleur est la maitresse du jeu fantasque de la lumière. Chacune des propositions picturales est dominée par le choix d’une couleur unique, ambiante, irradiant l’espace évoqué de son caractère chromatique et le libérant ainsi d’une quelconque réalité.
L’expression de ce songe horticole nous isole un temps de l’agitation humaine et invite à nous réintroduire dans le jardin originel.

-L'eau monte

« 2010, l'eau monte... » est le titre d'un nouveau chapitre de la production picturale d'Anne Laurence TERRASSE. Par cette courte phrase, on peut déjà pressentir l'intention dramatique contenue dans l'œuvre.

L'auteur née dans la fin des années 50, voit apparaître dés sa jeunesse la préoccupation écologiste et sera, comme ses contemporains, saisie par l'angoisse du désastre annoncé.

Cette création picturale est une plongée dans le deuil d'un monde technologique tout-puissant. Sur fond de crise mondiale, on peut imaginer ce face à face amer avec ce héros vacillant sous la donne du joug planétaire.

Mais au delà de cette proposition grave, issue de la sensation d'une société en panne, c'est un hommage aux machines, objets aux lignes rigoureuses, usinées pour coopérer avec l'homme, et à leurs bouleversantes présences.

Par ces mises en scène picturales de leurs carcasses pourrissantes, à moitié immergées dans la montée des eaux, Anne Laurence TERRASSE cherche à capter l'intensité de cette confrontation entre deux puissances, celle de l'ordre naturel et, signalée par ces monstres de métal éprouvés, celle du désir humain de s'en dégager.

C'est l'effet de tension qui subjugue l'auteur.

Cette démarche artistique n'est pas morale car qui peut dire ce que représente la Machine dans l'ordre naturel ? Mais l'auteur joue avec ce contexte actuel d'interrogation planétaire pour le pur plaisir de la représentation du drame.

La technique de peinture matiérée , encastrant, dans son magma organique quelques lignes nettes, renvoie à cette représentation d'une humanité de moins en moins sûre d'elle-même, au seuil de l'anéantissement possible.

Les supports, châssis 80x80 cm enduits sur bois, ont été réalisés aux Ateliers Marianne.